Elle regarde son téléphone une dernière fois. Vérifier l'heure du rendez-vous. Un sourire se dessine sur son visage. Dans les temps. Elle regarde un peu partout autour d'elle dans le S-Bahn. Les gens passent, ils font pas attention à ce qui les entoure. Marlen, elle aime bien observer. Elle fait souvent ça. Ça l'occupe, ça la détend, ça l'inspire. Les arrêts se succèdent, se rapprochent de plus en plus de Neukölln. Elle pousse légèrement le bouton de la porte, descend. Les écouteurs dans les oreilles, elle ne vit plus qu'au son du Lac des Cygnes. Le ballet régit sa vie. Les jours avancent et elle n'a que ça en tête. Ses seules escapades sont ses visites à ses parents, les bras de Jasper, les sorties avec ses amis. Comme maintenant. Etre le modèle, elle adorait ça. Sentir les pinceaux de Zédora la transformer en quelque chose de nouveau.
Elle s'appuie contre le mur alors qu'elle presse son doigt contre la sonnette. Son regard s'attarde sur ses mains fines. Les tâches de rousseurs s'y sont aussi étalées, comme sur le reste de son corps. Gamine, elle avait tenté de les dissimuler sous du maquillage. Plus maintenant. C'était la partie d'elle qu'elle préférait aujourd'hui. Elle a le sourire idiot sur le visage, juste à cause de ses petites couleurs parsemées sur sa peau.

j'ai préféré faire court pour le départ

Le visage se décore d'un sourire en voyant l'entrain habituel de la petite artiste. Marlen se laisse entraîner dans la pièce, sans regarder derrière elle. Elle aime bien Zédora. Elle a cette joie de vivre, ce sourire sur son visage. Marlen, elle aimerait bien être comme elle. Pas se soucier autant de ce que les autres pensent d'elle. Ne plus avoir l'impression qu'on la regarde en permanence et qu'on retiendra le moindre de ses faux pas. Mais elle sait très bien que c'est peine perdue, qu'elle sera toujours cette gamine toujours à la recherche de l'estime des autres. Même si elle se fait forte devant les autres filles de la compagnie, savoir qu'elles font tout pour la nuire la brise. Son regard suit les mouvements de son hôte alors qu'elle s'installe. Marlen fait de même, s'appuyant contre un tabouret. « Bien remplie. J'ai fait des essais costumes pour le ballet. J'aurais jamais imaginé que c'était aussi fatiguant de changer de vêtements. » Un léger rire s'échappe de sa bouche. Couvrir le mal-être. Les fameuses collègues qui s'amusaient à planquer ses costumes, les échanger. La maturité déconcertante. La jalousie malsaine. Elle en parle pas. A personne. Elle pense que ça intéresse personne. C'est sûrement le cas d'ailleurs. Elle laisse couler Marlen. Elle cherche pas le conflit, pas dans le travail. Trop peur de se faire écarter par un problème de comportement. « Et toi, tu as l'air d'être pleine d'inspiration aujourd'hui. » Un rire nerveux, encore un.